210 - Juin 2021 Juin 2021

Mixité, coéducation, éducation égalitaire : on t'explique tout

Mixité, coéducation, éducation égalitaire : on t'explique tout

Mixité, coéducation, éducation égalitaire : on t'explique tout


  • Solange, animatrice fédérale Baladins

  • Coralie, animatrice fédérale Éclaireurs et Diversité et Inclusion

[…] La fédération prône l’éducation égalitaire. Qu’elles soient mixtes ou non, les sections sont ouvertes à tous, dans le respect de la différence de chacun, source d’enrichissement pour tous. […] Extrait du paragraphe Accueil de tous de Notre identité.

C’est bien joli tout ça, mais que met-on derrière le terme “éducation égalitaire” ? Et la coéducation, elle se retrouve où ? 

Genre ≠ sexe

Si t’as loupé l’info dans le Ca se discoute de février, c’est par ici. Mais, pour rappel : 

  • SEXE = statut biologique défini par de nombreux facteurs (chromosomes, organes reproducteurs internes et externes) = mâle/femelle/intersexe.
  • GENRE = rôles, comportements, activités, etc. attribués aux filles/femmes et aux garçons/hommes.Lorsqu’on parle d’égalité entre les filles/femmes et les garçons/hommes, on parle d’égalité de genres et non de sexes.

https://youtu.be/xtbDynD7DE8

Quelques concepts

Éducation égalitaire

Comme tu l’as lu dans l’introduction, en tant que mouvement éducatif, nous prônons une éducation égalitaire, en d’autres mots une éducation qui renforce l’égalité des genres. L’égalité des genres signifie la même jouissance de droits, de responsabilités, d’opportunités et de ressources, que l’on soit femme ou homme, fille ou garçon. L’égalité des genres n’implique pas que les femmes et les hommes deviennent identiques, mais que les droits, les responsabilités et les opportunités des femmes et des hommes ne dépendent pas du genre auquel on s’identifie. L’égalité des genres peut être atteinte de plusieurs manières. L’une d’elles, c’est la coéducation, c’est pour ça que l’on t’en parle souvent chez Les Scouts.  

Mixité de genre

C’est la cohabitation de filles et de garçons au sein d’un même groupe. La répartition n’est pas obligatoirement égale. Exemple : dans la cour de récréation, les filles et les garçons se côtoient. 

Coéducation

C’est le fait d’animer et éduquer ensemble des filles et des garçons dans le respect de chacun. Bien qu’elle ne soit pas un but en soi, c’est un bon moyen d’atteindre l’égalité des genres car vivre des activités en coéducation permet :

  • aux filles et aux garçons d’apprendre à respecter le rythme, les sensibilités et les aspirations de chacun ;
  • aux jeunes d’apprendre à affirmer leur identité au travers de relations basées sur la coopération et la reconnaissance de l’autre ;
  • aux jeunes de développer des attitudes positives les uns envers les autres ;
  • de préparer les jeunes à faire face aux exigences d’un monde où hommes et femmes collaborent pour trouver leur juste place : une fois adultes, les jeunes ayant vécu en coéducation sont capables plus facilement de gommer les stéréotypes.

En bref, on reconnait les richesses tout en prenant en compte les différences de chacun. C’est précisément pour cela qu’elle permet de renforcer l’égalité des genres. 

Voilà donc les termes utilisés chez Les Scouts. Peu importe comment tu les nommes, ce qui compte c’est que tu les aies compris. 😉

Section mixte = coéducation assurée ? Oui et non !

Ce n’est pas parce que filles et garçons se côtoient au sein d’un même groupe qu’ils s’enrichissent spontanément au contact les uns des autres. La mixité doit être réfléchie si on veut qu’elle puisse devenir de la coéducation au quotidien.

Bien que celle-ci soit facilitée dans les sections mixtes puisque filles et garçons vivent ensemble au quotidien, elle n'est pas pour autant impossible dans les sections non-mixtes. Rien n’empêche deux sections non-mixtes d’unités différentes de se rencontrer régulièrement pour vivre une activité en coéducation.

Une section non-mixte permet aux scouts d'être eux-mêmes...

On entend souvent qu'on est mieux entre filles/garçons parce que l’on peut se lâcher, on n’a pas peur d’être naturel. Pourtant, tout le monde pète sous la tente et ce n’est pas une question de genre… Le critère est plutôt de l’ordre de la connaissance de l’autre. Pour être à l’aise, il faut vivre en groupe et se connaitre. 

Dans les ribambelles, les meutes, les troupes, les postes ou en staff, ce qui compte, c'est de se sentir bien avec l’autre et d’oser être soi.

Section mixte, petits groupes non-mixtes ? 

Dans une section mixte, certains jeunes ont parfois besoin d'un espace pour se retrouver entre individus du même genre, particulièrement chez les adolescents. N'hésite donc pas à utiliser le bon vieux "Ask the scout" pour savoir si tes scouts sont dans ce cas-là et, le cas échéant, pense à prévoir quelques activités lors desquelles les petits groupes temporaires seront non-mixtes.

On constate que ce besoin est nettement moins présent chez les ados qui ont eu l'opportunité de fréquenter une ribambelle et une meute mixtes. Habitués depuis l'âge de 6 ans à scouter ensemble, les jeunes se voient avant tout comme des scouts, plutôt que comme des filles et garçons. 😉

Sections mixtes avec petits groupes non-mixtes, sections non-mixtes, sections mixtes avec petits groupes mixtes, il n'y a pas de recette unique : de nombreuses formules se vivent avec succès dans toute notre fédération. Le plus important, c'est de veiller à ce que les stéréotypes de genre ne soient pas présents dans ta section (qui, contrairement à ce que l'on pense, peuvent se renforcer dans les sections non-mixtes puisqu'en ne vivant pas les uns avec les autres, garçons et filles n'apprennent pas l’un de l’autre).

Ados et sexualité

Il parait que : 

  • « Plein de choses se passent dans les tentes dans les troupes mixtes… »
  • « Ils dorment même dans le même sac de couchage ! »
  • « À cet âge-là, les laisser ensemble, c’est tenter le diable. »

À l'adolescence, l'attirance pour l'autre, l'envie de relations, de moments privilégiés à deux se manifestent. Cela fait partie de la construction de la personne. Nul n'échappe à la règle !

La sexualité fait partie du développement normal des adolescents, c'est pour ça qu'il est important de fixer un cadre, par exemple au travers d'une charte construite collectivement. Et ces règles, elles doivent être définies, que la section soit mixte ou non (finalement les histoires de cœur, ça n'arrive pas que dans les troupes mixtes, et c'est très bien comme ça !). 

Checklist pour une éducation encore plus égalitaire 

Pour faire vivre la coéducation, il faut que les scouts et les animateurs se posent les bonnes questions. Et qu’ils prennent le temps de poser des conditions d’animation, des règles de vies et un cadre aussi harmonieux que possible.

Voici quelques pistes d’action

  • Pour favoriser la rencontre, avoir une attention à la constitution des groupes, en veillant à leur hétérogénéité. 
  • Veiller à la distribution de la parole : solliciter les jeunes (filles et garçons) qui parlent peu, temporiser celles et ceux qui parlent trop, de manière à ce que chacun-e puisse prendre une place dans les échanges. 
  • Avoir une attention à la répartition des prises de décisions : pour que chacun-e ait son mot à dire.
  • Proposer des activités dans lesquelles chacun-e pourra prendre une place non assignée : des jeux de ballon plutôt que du foot, par exemple. 
  • Si l’on propose des activités dites genrées (assignées généralement à l’un ou l’autre sexe, comme remplir les jerricanes d’eau pour les garçons ou la cuisine pour les filles), veiller à ce que chaque jeune qui le souhaite puisse y accéder et y prendre une vraie place, sans être ni jugé-e, ni surprotégé-e, ni limité-e dans l’activité. 
  • Permettre à chaque jeune de choisir son activité sans freiner son choix par des questions (« tu es sûr-e que c’est ce que tu veux faire ? tu ne préférerais pas plutôt… ? ») ou par des préoccupations pratiques qui sont du ressort des animateurs (un seul vestiaire, pas de tenue pour lui/pour elle, etc.). Il ne faut pas lui faire sentir que sa venue dans l’activité est inattendue, surprenante ou que cela suscite des difficultés, du malaise… Faire attention aussi au non-verbal (un regard étonné ou un froncement de sourcils en disent parfois plus long que des paroles). A contrario, il ne faut pas témoigner non plus d’un enthousiasme débordant : éviter en fait toute attitude qui témoignerait d’un côté exceptionnel à la situation.
  • Durant l’activité, ne pas surprotéger la/le jeune, ni la/le stigmatiser même avec bienveillance (en lui donnant un autre rôle, en l’empêchant de faire la même chose que les autres ou en l’encourageant de manière exagérée). Même si elle/il le fait « moins bien », lui permettre d’expérimenter, de trouver sa place. 
  • Réagir auprès des autres jeunes en cas de remarques, ne cautionner ni les blagues sexistes, ni les moqueries. Ne pas faire comme si on ne voyait ou n’entendait rien, mais au contraire susciter le débat, faire s’exprimer les malaises, les questions… pour en faire quelque chose d’utile pour chacun-e.

Montrer l'exemple

Toute cette énergie que tu déploies pour que tes scouts expérimentent la coéducation et que l'égalité des genres fasse vraiment partie de leur quotidien, déploie-la aussi au sein de ton staff

Eh oui, veiller à la répartition équitable des rôles entre les scouts c'est bien, mais y veiller au sein de ton staff aussi c'est mieux ! 😊

Ta section veut passer à la mixité ?

Deux points essentiels à garder en tête.

1. Une affaire de CU

Le conseil d'unité doit soutenir cette initiative. Il doit prendre un engagement quant à la continuité, mais aussi à l’élaboration et l’évaluation de son projet d'animation en fonction de cette nouvelle réalité (même si elle n'est vécue que dans certaines sections). 

Pour qu'une section puisse vivre en mixité au sein de l'unité, il faut qu'elle y trouve les appuis suffisants et la volonté de faire progresser l'expérience.

2. Informer les parents

Particulièrement si on envisage le passage en mixité d'une section non-mixte existante. Si une majorité de scouts ou parents concernés ne sont pas d'accord, le projet est compromis dès le départ. Une explication du projet est indispensable pour déconstruire les mythes et les préjugés liés à la mixité.

L’objectif est de rassurer les parents qui refusent le changement car ils ont des craintes (« Mon fils aura sa première relation sexuelle à la troupe » ; « Ma fille ne voudra plus se balader dans la prairie habillée n'importe comment avec les cheveux gras »). Leurs craintes sont souvent liées à des préjugés qui peuvent être déconstruits si on prend le temps de le faire.

Dans tous les cas, ton équipe fédérale t’accompagnera tout au long de la démarche. Contacte-la !

Un peu d'histoire 

Les premières sections mixtes ont vu le jour en 1973 et depuis, on a parcouru un sacré bout de chemin (graphique ci-contre). 

À cette époque, il y avait une vraie volonté de changer les relations entre hommes et femmes dans la société. La mixité des sections est apparue comme un bon moyen pour :

  • Réduire les a priori et fausses images.
  • Tenir compte de la richesse des différences et des complémentarités, les faire découvrir.
  • Que les jeunes bâtissent entre eux des relations qui permettent à chacun de progresser, de s’enrichir.
  • Apprendre à respecter le rythme, les sensibilités et les aspirations de chacun.

Autant d’objectifs (et bien d’autres) plus facilement atteignables grâce à la coéducation.

Deux journées pour en savoir plus !

La question de la coéducation t'intéresse ? Tu voudrais en savoir plus sur l'évolution de la mixité dans notre fédération et découvrir en avant première les outils qu'on a prévus spécialement pour t'accompagner dans la découverte de cette thématique ? Rendez-vous à Courrière les 11-12 septembre pour en parler. 😉

Et les jeunes non-binaires dans tout ça ?

Il est vrai que dans le cadre de l’éducation égalitaire, nous évoquons les genres fille/garçon. Cependant, nous n’oublions pas les personnes qui ne s’identifient pas spécifiquement au genre qui leur a été assigné à la naissance, ou encore celles qui ne s’identifient à aucun genre. Éducation égalitaire et prise en compte des autres identités de genre ne sont pas incompatibles.

En effet, au-delà des filles et des garçons, il s’agit plus largement d’éduquer tous les jeunes de la même manière. Ainsi, l’éducation égalitaire au travers de la coéducation ou encore de la déconstruction des stéréotypes de genres ne peut être que bénéfique pour tous les jeunes, peu importe leur identité de genre. Veille donc à ce que chaque jeune, quel qu’il soit, se sente accueilli dans ta section qu’elle soit mixte ou non. #SafeSpace

Envie d'assouvir ta curiosité ? 

Voici quelques outils sur la mixité / coéducation / égalité des genres pour discuter en staff ou en conseil d'unité :

  • Kit CU "Question de genre".
  • "Mixicamp" des Éclaireuses et Éclaireurs de France, qui propose des pistes de réflexion intéressantes pour définir le cadre de vie (en camp, notamment). Ainsi que des animations sur la mixité / coéducation / égalité des genres à faire avec les scouts.
  • "Mix'Outils" de Céméa.
  • "Carrés Genre" du Monde Selon les femmes pour déconstruire les stéréotypes de genre (téléchargeables gratuitement) :
  • Him 'n her des Scouts et guides suédois (en anglais).
  • Les petits dépliants d'autodéfense antisexiste réalisés par "Maman, rodarde" peuvent aussi servir à lancer une réflexion avec les scouts autour des stéréotypes de genre. 
  • Le kit d’action “He for She” de l’OMMS.