L’histoire d’un Erasmus scout en Norvège

L’histoire d’un Erasmus scout en Norvège

Par Sylvain, Erasmus scout en Norvège

Il y a un an maintenant, j’ai entrepris des démarches pour partir vivre six mois en Norvège avec le programme Erasmus. Depuis janvier, je vis à Bergen, seconde ville de Norvège en termes de population et pourtant peuplée de moins de 200 000 âmes. Mais l’histoire que je vais vous raconter ne parlera pas de cette ô combien magnifique ville, de ses jolies petites maisons qui font sa renommée ou du prix vraiment désastreux de sa bière, non. Ces lignes sont consacrées à une expérience que je vis actuellement en tant qu’étudiant Erasmus, mais aussi en tant qu’animateur scout ou, pour résumer la chose, à ce qu’on appelle l’Erasmus scout.

Vous tous qui lisez ces lignes, vous connaissez (au moins de nom) le programme Erasmus, essayez donc bien de vous imaginer : débarquer dans un nouveau pays dont vous ignorez les coutumes, le climat, la manière de vivre et où, entre autres choses déroutantes, vous doutez constamment de l’attitude à adopter pour saluer quelqu’un (à Bergen, par exemple, on se serre la main, la bise est réservée aux personnes très proches telles que les couples – dixit une amie norvégienne – , et le gros malaise qui peut arriver quand vous tentez une bise vous dissuadera de retenter le coup). Faire un Erasmus, c’est vivre toutes ces différences, s’en imprégner, essayer de comprendre l’autre et de vivre sa différence, et il en va de même avec l’Erasmus scout.

C’est dans cet état d’esprit-là qu’il y a de ça un an, j’ai décidé de faire d’une pierre deux coups. Je voulais expérimenter, vivre la différence de culture tant comme étudiant que comme scout, voir comment les scouts de Norvège agissent, de quoi sont faites leurs réunions, quelles similitudes existent entre eux et nous, scouts de Belgique, et tout ceci afin de mieux comprendre le monde du scoutisme dans sa dimension internationale.

Dans cet article, je ne vais pas tenter de faire une revue exhaustive de toutes les différences et similitudes qui existent entre eux et nous. Déjà du fait que ma propre expérience n’est jusqu’à présent limitée qu’à trois mois en compagnie d’une unité scoute norvégienne, mais aussi du fait que cet article serait trop long et, surtout, de par la difficulté d’établir qui est le « nous » que je citais, notre petit pays étant bien différent d’une région à l’autre, et même d’une unité à l’autre. Je vais plutôt vous expliquer l’expérience fabuleuse que représente la découverte d’une nouvelle culture scoute, de nouvelles manières de faire et de jeunes aussi formidables que difficilement compréhensibles quand ils ne parlent pas anglais. 😅

Les scouts de Skjold

Lors de ma première rencontre avec le groupe de Skjold, je ne savais rien de ce groupe, excepté que c’était un groupe de filles géré par au moins une animatrice, le reste appartenait à la surprise. C’est donc un mardi, par une belle fin d’après-midi neigeuse, que je me rendis dans un petit village à deux arrêts de Bybanen (le tram local) de mon kot. L’animatrice avec laquelle j’étais en contact m’avait dit de la retrouver devant l’église du village. Ne la voyant pas arriver malgré l’heure tardive, c’est par moi-même que je découvris ce qui serait par la suite mon lieu de rendez-vous de tous les mardis soirs.

Les locaux des scouts de Skjold sont situés au sein de l’église du village, et leur relation avec le christianisme est semblable à celle de mon unité, c’est-à-dire que mis à part le chant de fin de réunion rien n’est chrétien. Ainsi, et suivant les retardataires entrant dans l’église, je découvris un petit groupe d’une quinzaine de scoutes de tous âges, allant de 8 ans à 17 ans et une de leur animatrice, de 26 ans, que j’ai abordé pour me présenter.

De prime abord, j’étais déjà étonné de la diversité du groupe en termes d’âges, étant donné que dans pas mal d’unités de chez nous des sections existent pour chaque tranche d’âge. J’apprendrai par la suite que cette unité était différente des autres sur cet aspect-là du fait de sa petite taille. L’animatrice m’informa de plus que seules les scoutes les plus âgées savaient bien parler anglais, soit 4 à 5 scoutes sur tout le groupe ! Communiquer avec les plus jeunes serait donc un autre défi à relever.

L’activité du jour consistait en de petits jeux avec des cordes dont le but était d’apprendre de manière ludique à faire des nœuds, ce qui était assez pratique comme technique d’enseignement vu l’efficacité du groupe à faire ces nœuds. Ce type d’activité est très courant dans mon groupe, ils apprennent ainsi entre autres des choses sur la nature, les premiers secours, la cuisine, comment faire un feu, mais ont aussi d’autres types d’activités telles que partir en hike à l’occasion d’une réunion, faire du vélo, aller à la piscine et bien d’autres activités, tant à l’église qu’en forêt ou sur la plage (Bergen étant une cité côtière).

Je notais également durant l’activité dont je vous parlais d’autres choses étranges pour un scout belge, telles que par exemple le système de foulards qu’ils utilisent en Norvège. Là où à la sixième Ourthe-Amblève (mon unité) le foulard est symbole de l’unité scoute à laquelle tu appartiens, dans l’unité de Skjold et en règle générale en Norvège, le foulard est utilisé comme indicateur de l’âge de celui ou celle qui le porte : jaune pour les 6-7 ans, rouge pour les 8-9 ans, bleu pour les 10-15 ans avec une particularité pour les “jeunes leaders“ (chefs de patrouille) qui eux ont un vert, bordeaux pour les 16-25 ans et bleu sombre pour les chefs (les plus de 25ans qui décident d’être animateurs).

À chaque semaine son nouveau lot de nouveautés ! Au fil des semaines, j’ai donc vu varier les activités de ce groupe alternant entre celles que j’ai citées ci-dessus, mais également changeant pour certaines occasions spéciales. Ainsi, la réunion de la semaine du 22 février (date qui célèbre la journée internationale du scoutisme) fut consacrée au mouvement scout mondial et j’ai également eu l’occasion de présenter mon unité à mon groupe. Une autre occasion spéciale fut le premier weekend de ce semestre. Celui-ci était exclusivement réservé aux plus grandes scoutes et consistait à rejoindre une cabane perdue au milieu de la nature et d’y dormir une nuit. Bien sûr, il ne s’agit pas que de dormir, mais c’était également l’occasion de cuisiner ensemble, de parler et de manger des marshmallows autour du feu. Mais une des particularités de ce weekend était surtout de presque dormir à la belle étoile : notre “ gite“ était en fait un mini abri avec juste un toit et un mur en rondins derrière nous (tout le reste était ouvert), ce qui n’est pas très isolant pour les nuits dont les températures pouvaient à cette époque-là encore être négatives... Ainsi, munis d’un hamac et un sac de couchage de compétition (façon de parler, enfin presque) nous avons profité des bruits nocturnes et du froid d’une nuit de fin d’hiver norvégien, ce qui était plutôt agréable au final.

Au fil de mes rencontres avec cette troupe, j’ai également pu apprendre à connaitre les scoutes elles-mêmes, et à en apprendre plus sur mon pays d’accueil, mais aussi sur ce qu’elles vivent en tant que scoutes. Elles m’ont par exemple parlé des cérémonies qui sont prévues dans leur mouvement. Sans surprise, ni totémisation ni qualification dans le lot, toutes s’appellent par leur nom en tout temps. Leurs seules cérémonies sont la Promesse scoute (que chacun d’entre nous connait), mais également une cérémonie à l’occasion du passage de chaque scout dans une nouvelle section, cérémonie à l’occasion de laquelle la scoute qui passe reçoit un nouveau foulard, symbole de sa nouvelle section et donc de son âge.

Cependant, une grosse différence avec (cette fois-ci en règle générale) la Belgique, c’est l’âge des animateurs scouts. J’ai 23 ans, et dans mon unité je suis dans les plus vieux animateurs, en Norvège je ne suis même pas encore sensé être animateur mais Rover, et ce, jusqu’à 25 ans. C’est à 26 ans que la plupart deviennent animateurs, à l’exception des animatrices de mon groupe qui ont 28 ans et qui animent depuis qu’elles ont 17 ans pour les besoins du groupe (sinon le groupe n’aurait pas d’animatrices), mais les animateurs des scouts (garçons) de cette unité ont pour leur part la quarantaine, ce qui est normal en Norvège.

Pour conclure, je dirais qu’un Erasmus scout c’est une manière différente de découvrir ce qu’est être scout, découvrir le scoutisme dans sa dimension internationale avec toutes ses différences et merveilles, mais aussi découvrir notre pays d’accueil sous un autre angle, qui fait réfléchir et nous permet de vraiment vivre l’expérience de l’Erasmus non pas juste en tant qu’étudiant étranger mais aussi en tant que local.

Tamarin Sans Tournants,
Sixième Ourthe-Amblève (6OA, Scouts de Tilff)